visiblement, cette fois-ci c’est vert
c’est absurde ce vert, à priori personne ne mettrait ça, et c’est justement pour ça que ça finit par avoir sa place sur toi. avant c’était rouge, une année, c’était du cuir. peut-être du blanc aussi, du nylon. pendant une période c’était plutôt tendance, des vestes légères comme sur les court de tennis, enfin bon, comme en fin de plage, avant la voiture, à taper ses godasses contre la vitre de la cabine téléphone pour les vider de leur sable, retourner dans les sièges qui épongent le sel de mer sur les cuisses, qui brûlent un peu. les plis des genoux. le seul souvenir que j’ai ce sont des repetto blanches, et j’ai pensé ah tiens comme celles que Serge mettait l’été. je serais cinglée au grand jour si l’on connaissait le fond de mes pensées, je sors sans fumer de la petite salle de concert, je me donne une contenance à l’extérieur, je te souris, à l’intérieur aussi, je suis ridicule de ne pas parler. cette curiosité est trop extrême et dirigée, je connaissais ton prénom avant de l’entendre dans ce salon, on se lisait tous des textes c’était le but, on se taisait tout poliment ou on engloutissait des pistaches en fixant nos pieds avec des airs concentrés, des intellectuels qui se font des blagues d’intellectuels, et j’étais tétanisée par ta voix et tes mots, et forcément par ton corps, à paris j’y ai repensé, je faisais l’amalgame des vestes, puis les contours devenaient plus fous, il suffisait du rouge, des chaussures blanches, je me trahis totalement ici, et encore on n’y verrait que du feu parce qu’on peut faire taire n’importe quelle préoccupation sous couvert de prose, les troubles sont des coquetteries, les prénoms s’inter-changent, mais je ne sais pas dans quoi tu pourrais te retrouver, je ronge totalement ma branche, je la lime de la main droite, je fais tout pour me descendre, mais quand-même, du vert ? mais c’était quand même comme un rayon, un phare d’angoisses, toutes les fois où j’ai regardé mes pieds (sans pistaches), pour rougir en paix, si seulement je m’étais souvenue de l’exactitude de ta peau – parfois je m’en veux de fermer les yeux de gêne. on serait beaucoup à mériter de l’autre ces mêmes interrogations, jusqu’à mémoriser les couleurs des vestes. un soir que je feuilletais la bible dans un bar, parce que ça traînait, j’ai regardé dehors, et encore sur le trottoir, tu marchais, et il y a un truc mathématique, je le verbaliserai un jour, il y a quelque chose qui ressort des chiffres et aussi de mysticismes, il y a de ça depuis la première fois (je ne vais pas dater, je ne veux pas être cinglée maintenant) ou si je dois l’être ce sera hors des parenthèses et c’est un peu un aveu et une vulgarité de plus (tout le monde le sait – au final je me cache à moitié) et ces parallèles sans fin ce sont mes circonvolutions dans le monde réel, d’un côté il y a les rires (jaunes, verts, à ton aise) et ma vulnérabilité, la recherche de la forme, les caprices idiots des mots, ce n’est qu’un grand manifeste sans cri, une lettre qui s’abîme elle-même, et je continue de sortir sans fumer, et certainement de rougir sans parler, alors bon,
je ne sais même pas ce que je pourrais faire, parler davantage, embrasser (pour me cogner à des projections en toile ou en nylon), me déshabiller, je me souviens du jour où l’on écrivait à propos du lac, on buvait dans l’herbe, bucolisme cadré, j’avais juste envie de salir tes vêtements et quitter les eaux. tu es juste une autre cristallisation que je pourrais mettre sous vitre, dans une grande armoire murale de merde, branlante, que je regarde en buvant mon thé, avec satisfaction, garder mes actions en cage, me brûler les lèvres. alors bon.
une année, même période, je disparais en attendant que ça passe