Dormi trois heures cette nuit. Je tente désespérément de faire des phrases dans ma tête. Rien n’a de sens dans certaines positions. Sur le ventre, pas plus de mots. La bouche comme une impossibilité d’écouler la journée. Il faudrait s’hydrater, faire, pour démêler le socle, provoquer le bruit dans le corps, les talons qui frappent les plateformes, ce qui peut s’avaler, laver sa peau du monde minuscule qui s’y pose. La pilosité comme radar et comme bouclier. Les autres voix carcasses souliers reviennent comme des fleurs après les bavures. On pense que l’on pourrait partir pêcher ou couper du bois comme si de rien, de vieilles structures biologiques amies qui respirent, expirent, digèrent, éliminent, ensemble, dans une chorale fausse et dégueulasse.
Les chemises froissées n’auront jamais ma tolérance, ni même mon amusement. C’est un dépassement de soi aussi grave qu’une forme de mort. On étire, lisse, ou rien. On peut froisser tout le reste. Les gens, les phrases, le sexe. On peut froisser à l’intérieur des structures pour dire non, pour dire merde, pas encore envie de créer du sens dans tout. On peut vivre à reculons sans faire de mauvais pli. J’ouvre tous les livres, un par un, comme dans une envie folle de comprendre. Pourquoi le reste, le dehors a besoin d’histoires et de logiques. Pourquoi une logique dans une forme de lettre ou d’accent pire encore la ponctuation comme si c’était de notre devoir d’ordonner pour tranquilliser les endormis à rationaliser le discours écrit à coup de respiration-trait pause-point et j’en passe et des meilleurs. De vraies merveilles, posées en vrac dans un meuble, pour bien voir la tranche et lire le titre du contenu, ce qui résume grâce à la prétention de celui qui sait faire que les mots tombent juste, ce qui résume tous les fils de la broderie absurde que sont ces livres. Rien là-dedans tranquillise la journée qui décide de ne pas se passer. Il y a bien des prénoms mais aucun écho avec des visages connus. Je ne trouve pas le repos ou les quelques heures d’épuisement sur ces papiers. Je ne sais plus comment m’agiter pour dormir et parler de manière convenable. Quelle partie du corps finira par se digérer en premier ? la léthargie par l’hypereffusion mentale. Ne plus bouger parce que / trouver un sens à la position alors que rien n’a de sens et il faut arrêter de se mettre coupable de tout. La vraie victime ne pense plus en mesure de ronflements ou de muscles qui se tendent et se distendent dans la marche ou la danse absurde. Le corps chorale de toutes les discordes, qui criera le plus fort dans une tête qui n’entend que la nuit et qui ne trouve pas le repos pour autant ? les phrases ne tombent pas. Toujours pas sur le dos. Toujours pas dans la masturbation. Toujours pas dans les prénoms du dehors et des livres. Toujours pas dans la rigueur abjecte des marges et des histoires avec but. La réalité est ailleurs mais pour cela il faudra du sommeil, une bouche assez humble pour tous les mots et possibilités, une structure à la verticale. Toujours tout vers le haut. Ça fait bien, vu de derrière la fenêtre.
Sur la tranche, on écrira ‘’a vécu sans jour et sans position’’