I have danced inside your eyes How can I be real

j’en ai fait des exploits, j’en ai fait des manières

j’en ai dicté des lois j’en ai mangé des pierres

/

il ne faudrait jamais commencer, etc.

Je choisis mes jours pour être triste. Par exemple, il faut qu’il fasse très beau, pour que je puisse continuer à observer la vie en dehors de moi. Les gens partout, les chiens, les enfants qui courent et crient, tout ça. Aujourd’hui, il fait insolemment beau.

Depuis plusieurs années déjà, ma pensée se meurt toujours dans ma bouche. Rien ne sera ces nerfs et cette hargne. Les souffles et les cris ne se courbent pas en alphabet. Rien ne s’arabesque. Je lis trop pour parler. Je me tais trop pour reconstruire. Les choses se font toujours en dedans. Les rouages ne s’articulent pas – rien ne sera assez juste. Il faut garder les yeux, de l’air, les corps parfois. Pourtant il y a ces individus auxquels il y aurait à raconter. Les seuls. Mais ça ne sort plus, ça sort trop vite, dans le mauvais ordre, pour les mauvaises raisons, pour brusquer les corps, pour créer des connexions, pour vite se débarrasser aussi, des sons qui ne s’organisent plus mais qui s’enfilent comme des perles, et au bout du collier il n y a plus de fermoir alors tout dégringole et on se retrouve le cou nu, offert, on en tremble, la nudité descend jusqu’aux pieds, on est plus nu que si l’on parlait vraiment, et se taire c’est se parer, c’est un tombeau et une robe de gala, le silence. c’est dire toi oui, toi non, nous, non oui, c’est filtrer ! je suis toujours la muette qu’on n’aimera jamais jusqu’au bout, je suis toujours la bavarde des nuits où il faudrait dormir. J’ai tout vu et tout su dans mes rêves d’enfant, j’ai rien vu j’ai rien pu dans cette âge qui fuit. C’est un chiffre sable-mouvant, presque plus horrible que les lettres. Mais l’alphabet est le terreau de diableries interminables. Tout vit tout tue à partir des mots. Il ne faudrait jamais commencer ! Ou alors recommencer à l’infini. Se parler à soi pour se calmer, dans l’appartement vide, se parler dans le sens que l’on choisit, avec des intonations nouvelles. Mais au grand jour se coudre les lèvres et hurler en dedans ou d’autres manières, avec les mains ! faire ce qui ne peut se dire. tricoter ce qui pourrait être discours et confessions. je quitte pour ne pas avoir à trop remplir l’autre avec mes mots. et j’aime pour un jour réussir à trouver de l’ordre dans tout cela.

en attendant je suis, je marche, je vous vois, mais ma pensée se meurt dans ma bouche

Laisser un commentaire